La transition du monde informatique vers l’utilisation des transistors a constitué une révolution majeure. En effet, le remplacement des lampes triodes par les transistors a propulsé la technologie des ordinateurs des années 1940 et 1950 de la première à la seconde génération, inaugurant une ère de miniaturisation sans précédent. Ce composant minuscule est devenu l’élément-clé de régulation des flux électriques dans les dispositifs électroniques. Sa capacité à intensifier ou à réguler les courants et tensions a solidifié son importance dans le monde électronique. Plus encore, quand ces transistors sont assemblés au sein de puces, ils permettent d’exécuter des fonctions logiques vitales pour les programmes numériques, plaçant ainsi le transistor au cœur de l’innovation en microélectronique.
Les tubes électroniques, précurseurs des transistors, étaient caractérisés par leur grande fragilité, leur taille volumineuse et une nécessité de mise en chauffe pour leur fonctionnement. Ces composants, malgré leur ingéniosité pour l’époque, présentaient des limites énergétiques conséquentes, requérant des tensions élevées et consommant une quantité significative d’énergie.
A l’opposé, l’arrivée du transistor a été marquée par une série de qualités notables : une taille réduite, une robustesse accrue, et une capacité à opérer presque instantanément. Particulièrement, le transistor, avec son efficacité à faible tension, a ouvert la voie à l’utilisation de batteries comme source d’énergie, introduisant une mobilité et une flexibilité inégalées auparavant.
Bien que le transistor ait été conceptualisé dans les années 1940, son introduction massive auprès du grand public a suivi une trajectoire plus lente. Il faudra attendre 1954 pour que cette technologie trouve une application concrète avec la radio Regency TR-1. Cette latence souligne un phénomène courant dans le monde de l’innovation : une invention, aussi prometteuse soit-elle, ne garantit pas une adoption instantanée car les relais économiques et industriels doivent suivre. Cependant, lorsque le transistor a commencé à démontrer son potentiel révolutionnaire, son impact sur divers secteurs (notamment les domaines de l’informatique et des télécommunications) s’est amplifié à un rythme fulgurant. En attestent les décisions de géants industriels tels qu’IBM qui, dès 1957, décidèrent de délaisser les tubes électroniques au profit des transistors dans la conception de leurs ordinateurs.
Le transistor a pavé la voie à d’autres avancées remarquables. En 1958, l’émergence du circuit intégré a consolidé plusieurs transistors et autres composants en une unité compacte, optimisant l’efficacité et la performance. Une décennie plus tard, en 1969, l’avènement du microprocesseur a révolutionné le monde de l’électronique, consolidant une multitude de transistors pour exécuter des opérations complexes. Un exemple emblématique est l’Intel 4004 de 1971, une prouesse technique de l’époque.
Gordon Moore, cofondateur d’Intel, a postulé une prédiction audacieuse qui est devenue une référence dans l’industrie : le nombre de transistors sur une puce doublerait tous les 18 à 24 mois, entraînant ainsi une augmentation proportionnelle de la puissance de calcul. Jusqu’à son décès en 2023, cette conjecture a été largement vérifiée dans le cadre des avancées technologiques aboutissant à des puces contenant jusqu’à 114 milliards de transistors et même, dans des projets avant-gardistes, des super-puces avec 2 600 milliards de transistors. Et aujourd’hui, l’influence du transistor est palpable dans presque tous les aspects de notre vie. Du simple allumage d’une lampe à la conduite autonome d’une voiture, ce composant omniprésent joue un rôle indispensable. Il symbolise l’évolution de l’ère numérique, attestant de la capacité humaine à innover et à transformer la société.
Voyons maintenant comment fonctionne un transistor.
La nature semi-conductrice du transistor est essentielle à son fonctionnement. Un semi-conducteur est un matériau dont la conductivité électrique se situe entre celle d’un conducteur et celle d’un isolant. Cette propriété particulière est exploitée dans le transistor pour contrôler le flux de courant électrique, de manière similaire à un robinet régulant le débit d’eau.
Structuralement, le transistor est composé de trois couches alternées de matériaux semi-conducteurs, soit de type N (chargés négativement) soit de type P (chargés positivement). Ces arrangements donnent naissance à deux types principaux de transistors : le NPN et le PNP. Ces trois régions distinctes du transistor portent des noms spécifiques : l’émetteur, le collecteur et la base. L’émetteur, fidèle à sa désignation, émet des porteurs de charge, qu’ils soient positifs ou négatifs selon le type de transistor. La base, située au centre, est la région la plus fine et joue un rôle de médiateur en contrôlant le flux de courant. Le collecteur, quant à lui, reçoit les porteurs de charge émis par l’émetteur.
Le fonctionnement du transistor repose sur l’application d’une tension à la base. Sans tension, le courant est bloqué entre le collecteur et l’émetteur, rendant le transistor inactif, ou en état de « coupure ». Lorsqu’une tension est appliquée à la base, cela permet au courant de circuler, plaçant le transistor en état de « saturation ». C’est cette capacité de basculer entre ces états qui permet au transistor d’agir comme un interrupteur électronique. Outre cette fonction d’interrupteur, le transistor possède une caractéristique d’amplification remarquable. Une faible tension appliquée à la base peut entraîner un courant beaucoup plus important entre le collecteur et l’émetteur. Cette propriété est vitale dans de nombreux domaines, notamment dans les systèmes de communication et de traitement du signal. La lampe triode avait les même propriété lorsqu’ on appliquait un courant électrique modulateur à sa grille : nous vous en avons parlé dans nos précédents articles.
La polarisation est une étape nécessaire pour garantir le bon fonctionnement du transistor. Cela implique d’appliquer des tensions appropriées à ses différentes régions pour s’assurer qu’il fonctionne dans la zone souhaitée, que ce soit en coupure, en saturation ou dans la région active où il amplifie les signaux.Pour une analyse quantitative du comportement du transistor, la loi d’Ebers-Moll offre une équation détaillée décrivant ses performances en fonction de diverses variables. Cette loi, bien que complexe, est fondamentale pour la conception de circuits électroniques avancés.
Je terminerai mon article par cette vidéo d’ époque (1971) qui présente le processeur Intel 4004 qui était le sommet de la technique de l’ époque. Sans l’ invention du transistor, l’ existence de ce processeur révolutionnaire n’ eût point été possible. A bientôt !