Continuant, pour l’instant, à passer en revue les principales sources d’énergies renouvelables, je souhaite m’intéresser aujourd’hui à la question de la « biomasse » ainsi qu’aux principales objections dont elle fait l’objet.
La biomasse, terme englobant toutes les substances organiques potentiellement convertibles en énergie, se compose à la fois d’éléments d’origine végétale, tels que les déchets alimentaires, le bois, ou les feuilles, et d’éléments d’origine animale, y compris les restes d’animaux ou les organismes vivant dans le sol.
La diversité de ces matériaux a conduit à la classification de la biomasse en trois catégories distinctes, en fonction de leurs propriétés physiques :
1. Solide, incluant des matériaux tels que la paille, les copeaux de bois, ou les bûches. Ces solides servent à produire, par exemple, de la chaleur.
2. Liquide, regroupant des substances comme les huiles végétales ou les bioalcools pouvant remplacer les carburants classiques.
3. Gazeux, où l’on trouve principalement le biogaz, c’ est à dire les gaz émis par les êtres vivants où par leur décomposition organique.
La génèse de cette source d’énergie est singulière car elle provient de la capacité des plantes à convertir l’énergie solaire en énergie chimique grâce à la photosynthèse. La biomasse stocke ainsi de l’énergie sous forme de carbone organique prête à être exploitée et transformée selon des techniques adaptées à chaque type de matière.
Toutefois, il est crucial de noter que la biomasse est réellement qualifiée de « renouvelable » lorsque son rythme de renouvellement est au moins égal à son rythme de consommation. Par exemple, le prélèvement du bois pour la production d’énergie ne devrait pas entraîner une réduction nette de la couverture forestière. Dans une optique durable, il est essentiel de maintenir un équilibre entre la production et la consommation de ces ressources.
Plusieurs critiques, émanant de tous milieux académiques et engagés (y compris des défenseurs des énergies renouvelables) doivent être prises en considération relativement à cette source d’ énergie si celle-ci devait être employée à grande échelle. Parcourons dès lors quelques unes d’ entre elles :
L’une des préoccupations majeures liées à la production de biomasse est la concurrence qu’elle peut créer avec les terres agricoles dédiées à la production alimentaire. Les bioénergies, en particulier les biocarburants, nécessitent d’immenses étendues de terres pour leur production. Ces terres, souvent, sont celles qui étaient précédemment utilisées pour la culture de denrées alimentaires. En conséquence, une augmentation de la demande de cultures énergétiques pourrait potentiellement conduire à une réduction de la superficie consacrée à la production alimentaire, exacerbant ainsi les problèmes de sécurité alimentaire. Cette situation pourrait, en outre, conduire à une augmentation des prix des denrées alimentaires en particulier dans les régions qui dépendent fortement des importations.
La production agricole est également liée à la consommation d’eau. La culture de plantes pour la biomasse ne fait pas exception à cette règle. Avec l’augmentation de la demande de cultures énergétiques, l’utilisation de l’eau pour l’irrigation pourrait augmenter proportionnellement. Dans les régions où l’eau est déjà une ressource limitée, une concurrence accrue pour l’eau entre la production alimentaire et la production de biomasse pourrait exacerber les tensions hydriques. Cette situation pourrait avoir des répercussions profondes non seulement sur la disponibilité de l’eau pour l’agriculture mais aussi sur la qualité de l’eau, la recharge des nappes aquifères et les écosystèmes aquatiques.
Notons également que bien que la biomasse soit une source d’énergie renouvelable, sa conversion énergétique s’avère souvent moins efficiente que d’autres alternatives telles que le solaire ou l’éolien. L’énergie nécessaire pour cultiver, récolter, transformer et transporter la biomasse peut, dans certains cas, approcher ou même dépasser l’énergie qu’elle produit. Comparativement, les technologies éoliennes et solaires ont des rendements nettement plus élevés en termes d’énergie produite par unité d’énergie investie. Ces différences d’efficacité posent de graves questions cruciales sur la pertinence de la biomasse dans les mix énergétiques futurs.
Enfin, permettez-moi de faire remarquer que la rentabilité économique de la biomasse est un sujet de vif débat parmi les décideurs et les chercheurs. Dans de nombreux contextes, la production et la transformation de la biomasse en énergie, surtout sans économies d’échelle, pourraient ne pas être économiquement compétitives sans l’appui de subventions gouvernementales. Ceci contraste avec d’autres sources d’énergie renouvelable dont les coûts continuent de diminuer, rendant leur adoption plus attrayante du point de vue économique.
Suite à tout ce que je me suis permis de vous résumer ici de façon succincte, on peut donc penser que l’usage de cette source d’énergie présente des inconvénients qui peuvent éclipser ses avantages prétendus en tant qu’alternative renouvelable. Malgré son potentiel apparent en termes de disponibilité et de diversité, les inconvénients intrinsèques liés à son efficacité énergétique médiocre, à ses impacts environnementaux non négligeables, notamment en termes de pollution atmosphérique, et à son incertitude économique sans le soutien de subventions substantielles, jettent un voile de doute fondé sur sa viabilité à long terme. En comparaison avec d’autres sources d’énergie renouvelable, la biomasse semble moins prometteuse et pourrait nécessiter une réévaluation critique de sa place dans les stratégies énergétiques futures. Les investissements en recherche et développement, bien que cruciaux pour tout progrès technologique, pourraient être mieux alloués à des technologies énergétiques présentant des rendements supérieurs et des impacts environnementaux moindres.
Il me semble donc nécessaire de distinguer entre les effets de mode liés à notre époque et les analyses scientifiques objectives qui peuvent nous apprendre à mieux poser nos choix sociétaux en ces matières délicates qui engagent l’ avenir de nos sociétés.